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Les aminoacidopathies

Ce sont des maladies génétiques assez fréquentes, dues à un trouble dans la voie métabolique d’un ou de plusieurs acides aminés, elles sont souvent à transmission autosomique récessive (TAR).

Les aminoacidopathies représentent une part considérable dans la pathologie néonatale et pédiatrique.

Généralement découvertes dans la petite enfance, ayant comme conséquences : troubles neurologiques irréversibles, retard mental, retard psychomoteur … etc.

Le phénotype de ces anomalies va de l’expression totalement bénigne (histidinémie), au développement insidieux d’une encéphalopathie (phénylcétonurie), en passant par des anomalies sévères et rapidement létales (aciduries organiques, déficits du cycle de l’urée).

Plus d’une cinquante aminoacidopathies sont connues, elles sont classées en 02 groupes en fonction de  leur mécanisme physiopathologique :

  • Maladies d’intoxication
  • Aminoacidopathies par altération du système de transfert

Mécanisme physiopathologique

II-1-Aminoacidopathie par intoxication :

Dues à un  blocage enzymatique agissant sur la voie du catabolisme de l’acide aminé, responsable soit de l’accumulation de l’acide aminé lui même ou d’un produit de son catabolisme.

Ces deux types de produits (Aa /métabolites) se retrouvent en excès dans le sang et ou urines sont  toxiques aux concentrations élevées.

Le système nerveux est l’un des points d’impact de cette toxicité et beaucoup de ces anomalies se traduisent en phase aiguë par un coma comme dans les déficits du cycle de l’urée (intoxication par l’ammoniaque).

Dans certaines aminoacidopathies, l’intoxication est progressive et ne se manifeste qu’après plusieurs mois, exp : phénylcétonurie

D’autres organes son touchés essentiellement le foie, exp : tyrosinémie de type 1

II-2- Aminoacidopathie par altération du système de transfert :

  • Atteinte d’un seul transporteur d’Aa exp : cystinurie

Est une aminoacidopathie héréditaire secondaire à une mutation du gène SLC 3A 1 et /SLC 7A9 codant respectivement pour les sous unités r BAT et b0,+ AT  du transporteur des Aa dibasiques dans le tube proximal rénal et de la muqueuse intestinale.

Ce défaut de réabsorption induit à une excrétion urinaire abondante des Aa dibasiques : cystine, ornithine, arginine, lysine.

Elle se développe à tout âge mais les coliques néphrétiques dues aux calculs de cystine apparaissent généralement au cours des 20 premières années.

Le diagnostic repose sur l’examen physique, la détection de calculs de cystine et le dosage de la cystine urinaire.

Chez les patients homozygotes, l’excrétion urinaire de cystine est supérieure à 300-400mg/L par jour.

La lithiase et l’insuffisance rénale sont les formes cliniques de la cystinurie

  • Atteinte de plusieurs transporteurs d’acides aminés : exp maladie d’Hartnup

Une maladie génétique rare liée au transport anormal des acides aminés neutres dans l’intestin et le rein (tryptophane, alanine, asparaginine ,glutamine, histidine, isoleucine, leucine,  serine ,valine phénylalanine,  thréonine, tyrosine).

Les patients présentent une atteinte neurologique, photosensibilité, manifestations oculaires.

Une exposition au soleil, la fièvre, certains médicaments, un stress émotionnel ou physique, peuvent déclencher la maladie, elle progresse alors pendant plusieurs jours voire pendant 1 à 4 semaines avant rémission spontanée.

Le diagnostic est posé devant une hyperaminoacidurie par chromatographie des acides aminés au niveau urinaire.

Mutation du géne SLC 6A 19 codant pour un transporteur d’Aa.

Méthodes biologiques d’exploration

III-1- Tests d’orientation urinaires :

  • Odeur des urines (très caractéristiques) :

Odeur de souris ou de moisissure = phénylcétonurie

Odeur de sirop d’érable ou de bouillon de viande = Leucinose

Odeur de beurre rance = Hyper méthioninémie

Odeur de pieds = acidurie isovalérique

  • Réaction au chlorure ferrique:

Cette réaction détecter au niveau urinaire des acides α cétoniques des acides aminés tels que :

  • Phenylalanine, tyrosine  → coloration verte
  • Histidine →  coloration bleue
  • Réaction au DNPH :(2-4 dinitro phényl hydrazine)

Ce réactif donne un précipité jaune en présence des acides α cétoniques :

Phenylalanine, tyrosine, acides aminés ramifiés.

  • Réaction de Brandt : Rouge pourpre  à framboise  intense et stable : acides aminés ramifiés, homocystéine.
  • Réaction de Spath et Barber : Rose à rouge = homocystéine.

Dosage quantitatif des acides aminés

Les chromatographies des acides aminés dans le sang, les urines et le LCR ont pour but de rechercher des anomalies primitives ou secondaires.

  • Il peut s’agir de chromatographie sur couche mince (CCM) : la plus simple, permet de séparer

des acides aminés en solution déposés sur un  support poreux (une plaque  de silice),le solvant organique migre par capillarité sur le support et solubilise les  AA qui se déplacent plus ou moins rapidement en fonction de leurs propriétés (taille, polarité des radicaux…). Après révélation du chromatogramme on obtient des spots  colorés (on utilise la ninhydrine, colorant spécifique des groupements terminaux des AA)

  • La chromatographique d’échange d’ions couplés à une détection colorimétrique à deux longueurs d’onde (570 et 440 nm) après réaction avec la ninhydrine.
  • Peuvent être dosé par la CPG, HPLC, la spectroscopie de masse étant la dernière technique mise en place pour la détermination quantitative et complète des acides aminés dans tous les milieu biologiques, essentiellement rapide (3 minutes),en  plus elle est adaptée pour la détermination du profil  des acides aminés  au cours du dépistage néonatal sur tache de sang.

Seul un petit nombre d’aminoacidopathies se traduit par une anomalie isolée des acides aminés

(phénylcétonurie,  tyrosinémie), alors il est nécessaire de déterminer spécifiquement  l’acide aminé : phénylalanine, tyrosine.

Ces 2 acides aminés sont déterminés par technique fluorimétrique, cette  méthode de dosage utilise la propriété de certaines molécules d’être fluorescente, cette  fluorescence qui est proportionnelle à la concentration de la molécule.

PHENYLCETONURIE : (PCU)

Il s’agit d’une maladie génétique assez fréquente due à un déficit total ou partiel d’une enzyme hépatique : phénylalanine hydroxylase, qui permet la transformation de la Phe en Tyr.

Il existe une variante de la PCU, appelée PCU maligne est due à un déficit en cofacteur de la phénylalanine hydroxylase : tétrahydrobioptérine.

Cette pathologie génétique est à TAR, le gène codant l’enzyme est porté sur le chromosome 12 (+ de 500 mutations).

Ce blocage entraine une accumulation plasmatique de la Phe et la production excessive de métabolites à élimination urinaire tels que : acide phényl pyruvique, vu  que la voie principale du métabolisme de la Phe est bloquée (hydroxylation de la Phe) alors que la voie accessoire (transamination de la Phe) est énormément  sollicitée.

L’excès de phénylalanine est toxique pour le système nerveux central, dont les conséquences sont un retard mental, retard psychomoteur, convulsions, auto agressivité, épilepsie…..

On retrouve chez la majorité des enfants atteints de cette affection, une hypo pigmentation (teint clair, cheveux et yeux clairs) ,qui s’explique par  le défaut en tyrosine responsable du défaut en mélanines.

Le diagnostic de cette pathologie est purement biologique, il suffira de déterminer la phénylalanine sanguine par fluorimétrie, les valeurs physiologiques varient entre 10 – 40 mg/l.

Le traitement consiste en un régime pauvre en phénylalanine avec un apport quotidien de 250 – 500 mg/j, interdisant le lait et les produits laitiers, farine, pain, gâteaux,  pates, riz, œufs et les viandes.

Les fruits et légumes sont à contrôler.

hydroxylation de la Phe en Tyr
Figure1 : hydroxylation de la Phe en Tyr

métabolisme de la Phe
Figure 2 : métabolisme de la Phe

Dans les pays développés, la PCU a bénéficié depuis une trentaine d’années du dépistage néonatal systématique chez tous les nouveaux nés à j3 –j5 de vie ,ce qui a permis d’instaurer le traitement préventif de la PCU et d’assurer une vie quasi normale pour ces enfants.
Dans les pays développés, la PCU a bénéficié depuis une trentaine d’années du dépistage néonatal systématique chez tous les nouveaux nés à j3 –j5 de vie ,ce qui a permis d’instaurer le traitement préventif de la PCU et d’assurer une vie quasi normale pour ces enfants.

LA TYROSINEMIE

Il s’agit d’un groupe de pathologie concernant la voie du métabolisme de la tyrosine :

  • Tyrosinémie de type1 :

Il s’agit d’une maladie héréditaire à transmission autosomale récessive, du à au déficit en fumarylacétate hydrolase hépatique.

Elle se révèle par une insuffisance hépatique dés les premiers jours de vie, cholestase, hypoglycémie postprandiale, diarrhée, généralement les symptômes débutent après 15 jours de vie.

Sans traitement instauré  rapidement, le patient évolue  vers l’hépato carcinome (décès durant la petite enfance).

Le diagnostic est posé devant la présence du  succinyl acétone et acide delta aminolévunilique dans les urines, avec dans le sang une élévation de la tyrosine et de l’alpha foeto protéine.

Le traitement est aussi diététique, il repose sur une restriction en tyrosine et en phénylalanine, dans l’attente d’une transplantation hépatique.

Depuis quelques années, un nouveau traitement existe il s’agit du NTBC inhibiteur de la tyrosine oxydase qui supprime l’accumulation de composés toxiques en créant un bloc enzymatique fonctionnel plus proximal que cette voie métabolique, ce qui a permis de bouleverser le pronostic vital de  ces patients.

  • Tyrosinémie de type 2 :

Est une aminoacidopathie traitable due à un déficit en tyrosine aminotransférase hépatique responsable d’une  tyrosinémie élevée.

Elle se révèle par atteinte oculaire (photophobie, larmoiement, kératite), atteinte cutanée ,retard mental dans 50 %des cas.

Le diagnostic repose sur la détermination d’une tyrosinémie élevée.

Le traitement repose sur  une restriction contrôlée en phénylalanine et en tyrosine.

  • Tyrosinémie de type 3 :

Il s’agit d’une aminoacidopathie assez rare, due à un déficit en 4-hydroxy phényl pyruvate dioxygénase .

Le tableau clinique associe un retard de développement, des tremblements, agitations excessive.

Le diagnostic est obtenu devant une tyrosinémie  élevée associée à une excrétion urinaire élevée de 4-hydroxyphenylpyruvate, 4-hydroxyphenyllactate et de 4-hydroxyphenylacetate.

Le traitement consiste en une restriction en phénylalanine et en tyrosine.

L’HOMOCYSTINURIE  CLASSIQUE

Elle est due à un déficit en cystathionine béta synthétase (cbs) , enzyme hépatique du métabolisme de la méthionine ;à transmission autosomale récessive.

Normalement, l’enzyme CbS convertit l’homocystéine en cystathionine par la voie de transsulfuration du cycle de la méthionine, à l’aide du cofacteur pyridoxal 5-phosphate. Les deux autres cofacteurs impliqués dans la voie de reméthylation de la méthionine sont la vitamine B12 et l’acide folique.

Elle doit être évoquée devant un morphotype marfanoide, une ectopie du cristallin, une myopie non familiale, une déformation osseuse, un accident vasculaire  thrombotique artériel ou veineux, retard mental, troubles psychiatriques.

Le diagnostic repose sur la recherche d’une hyperhomocysteinemie.

il y a actuellement trois modalités de traitement reconnues. :

  • personnes sensibles à la pyridoxine, le traitement inclut de la pyridoxine à doses pharmacologiques associée à des suppléments en acide folique et en vitamine B12.
  • Chez les personnes ne répondant pas à la pyridoxine, le traitement recommandé est un régime pauvre en méthionine et enrichi en cystine, combiné avec des suppléments en pyridoxine, acide folique et vitamine B12.

LA LEUCINOSE

Ou maladie de sirop d’érable ou maple syrup urine disease, aminoacidopathie à transmission autosomale récessive.

Elle est due à un blocage enzymatique dans la décarboxylation oxydative des cétoacides obtenus par désamination des  acides aminés ramifiés (alanine ,valine, leucine, isoleucine)par déficit de l’alpha céto décarboxylase ,responsable de l’accumulation dans les tissus des 3 acides aminés et de leurs céto acides correspondants.

La forme classique représente 90% des cas. L’activité enzymatique est en général comprise entre 0 et 2%.

Elle est caractérisée par l’installation progressive d’un coma néonatal avec des difficultés de succion, une anorexie, des vomissements, une somnolence et une aggravation inéluctable dans les 2 à 3 jours.

Les 10% de formes autres sont à révélation plus tardives et atypiques.

Il existe les formes dites « intermédiaires » avec retard psychomoteur et de croissance et d’autres « intermittentes » avec des formes de coma à répétition dans lesquelles les taux de leucine sont moins élevés.

Le traitement est aussi diététique en instaurant un régime pauvre en leucine.